Entrevue avec Aesther...

Le vieux Peckhum avait traversé la galaxie, à bord de son vieux baroudeur. Une navette tellement rafistolée qu'à chaque décollage, on aurait pu croire que c'était le dernier. Elle vibrait et grinçait comme les portes de l'Enfer. Et pourtant, il était toujours en vie, livrant coûte que coûte sa précieuse cargaison à destination. Aujourd'hui, le vieux matelot avait un air préoccupé. Il arpentait nerveusement l'amphithéâtre des Sciences humaines, ses mains usées par le temps dans ses poches. Un étudiant s'approcha de lui.

- Je peux vous aider?
- Je cherche Aesther Loran. On m'a dit que je la trouverais ici...
- C'est exact, mais elle est en conférence. Veuillez patienter un peu, et je suis sûr que vous la verrez.
- Bon...

Il se força à s'asseoir. Ses mains se refermèrent sur ses genoux tremblants. Il rongea ses ongles en attendant que la jeune femme sorte. Finalement, les grandes portes de la salle de conférence principale s'ouvrent, et les étudiants, enthousiastes, sortent. Peckhum n'écoute pas la rumeur des conversations. Aesther est longue. Finalement, elle sort, sa cape de cuir claquant derrière elle, souriante, conversant avec les étudiants, l'holoprojecteur sous le bras.

L'étudiant se rapproche de son enseignante et lui glisse quelques mots à l'oreille. Son sourire s'efface alors. Elle hoche une dernière fois la tête et congédie gentiment ses jeunes gens.

- Monsieur Peckhum, heureuse de vous voir. Mais qu'est-ce qui vous amène ici?

Elle se rend alors compte de l'agitation de Peckhum. Elle s'asseoit immédiatement à côté de lui, posant sa main sur son épaule.

- Bon... bonjour, maître Loran... Je...
- Quoi?

Il tourne son regard bleu affolé vers elle.

- Je... Alderaande n'est plus.

Les jeunes gens quittent l'amphithéâtre. L'enseignant en guest resta un moment pour échanger avec eux, tandis que je rangeai mes affaires et vérifiai que tout était éteint. Certains restaient près de moi, commentaient et écoutaient les quelques compléments que j'avais à leur donner.

- Vous pourrez télécharger tout ça à partir de la banque de données, à partir de ce soir, je vais la mettre à jour.

Quelques discussions que je suivais d'une oreille distraite. Cela ne me ressemblait guère. D'habitude, j'étais très attentive à tout ce qui se disait, n'hésitant pas à reconduire mes élèves dans le droit chemin de pensée... Mais je ressentais un trouble immense dans la Force. Que se passait-il? Comme si le choeur d'une planète entière s'élevait d'un seul coup et me frappait de plein fouet.

- Je... excusez-moi. Oui, Thanaton était tout à fait en faveur de la liberté et justement nous offrait la liberté au creux de la main en annihilant le concept de destin.

Je sortis avec eux. En souriant d'un air absent. Puis, un étudiant qui s'était eclipsé durant la conférence revint et me glissa quelques mots à l'oreille. Peckhum? Mais que faisait-il ici? Non pas que le vieil homme fut un oiseau de mauvaise augure, mais il ne devait pas revenir à l'Université avant quelques temps... Mon sourire s'effaça. Je remerciai brièvement l'étudiant et m'excusai auprès du groupe.

Nous nous saluâmes et je lui demande d'aller directement au but.

- Alderaande n'est plus.

Devant le regard effrayé et la main tremblante du vieux marin, je n'hésitai pas à lui accorder du crédit. Mais Alderaande... Etait-ce cela que j'avais entendu en plein milieu de mon exposé? Ces cris déchirants, cette détresse, cette douleur... L'Empire?

- Seul l'Empire possède la puissance de feu nécessaire pour détruire une planète entière. Mais je ne les pensais pas capables d'un tel acte. C'est une déclaration de guerre.

- Oui.

- Mais ce qu'il me faut comprendre c'est pourquoi ils l'ont fait...

- L'Empire a ses raisons que notre raison ignore, marmonna le vieil homme, amère.

- Ce n'est que le début d'un conflit qui nous transcende...